Présentation de Annie TREMSAL GARILLON, Artiste transversaleAnnie Tremsal Garillon aime la polyphonie vocale du XIIIe siècle, la voix a capella., la musique contemporaine notamment Arvo Pärt. En littérature, ses livres de chevet sont aussi bien " Vide et plein " de François Cheng que les opus de Charles Juliet et les philosophes Michel Henry et Bertrand Vergely. La philosophie est une " manière de me mettre en ordre intérieurement " souligne l'artiste. Elle peint et elle grave depuis plus de 20 ans et quand on la rencontre, elle commence à parler non pas de peinture mais de musique, de philosophie et de poésie. Elle a beaucoup lu Henri Maldiney " Ouvrir le rien l'art nu " et Marc Halévy auteur de " Le taoïsme ". Les noms des peintres qu'elle apprécie viennent ensuite, eux aussi dans le désordre, chevauchant les époques et les styles. De l'art des Cyclades à Soulages en passant par Fra Angelico, elle établit des passerelles que l'on retrouve dans ses peintures et dans ses rencontres dont elle dit qu'elles l'aident à " naitre à elle-même et au monde ". Et ses goûts reflètent une dimension essentielle de sa personnalité : elle a horreur des cases et de l'enfermement dans les mots et dans une pratique artistique ou un champ de connaissances qui en exclurait un autre. Cette femme discrète, en rondeurs et en douceurs n'aime pas les discours convenus. La meilleure illustration en est son approche de la culture chinoise qu'elle vit depuis une quinzaine d'années loin de l'exotisme. Elle voyage beaucoup et son agent chinois qui l'a exposée dans des galeries dans toute la Chine est également son ami, un qualificatif à ne pas prendre à la légère en Asie... Son séjour dans le désert pendant plusieurs mois est un autre élément fondateur de sa démarche qui la conduit à se dépouiller du superflu. De la Chine et du désert, elle retient la nécessité impérieuse d'aller au delà des apparences, de s'enfoncer dans l'essentiel, loin du discours, dans les lieux insoupçonnés du " soi même ". Rien d'étonnant donc si ses couleurs fétiches sont le blanc et le noir et sa forme de prédilection le carré. Elle conjugue ce dépouillement formaliste avec des recherches sur des matériaux, fabriquant des supports en acier brut laminé à chaud pour ses diptyques. Rien de surprenant non plus si sa trajectoire artistique fait fi de tout dualisme et de toute forme d'opposition entre les expressions artistiques et entre les cultures pour, en partant justement de l'opposition (ombre et lumière, nuit et jour) aboutir à une forme d'unité sans forcer le temps nécessaire à la gestation. " Il y a un malentendu fondamental avec le Ying et le Yang revisités par les occidentaux qui les opposent en obérant le vide médian " explique t-elle. Son refus des convenances se ressent aussi dans l'appréhension de son environnement : elle vit dans la montagne vosgienne avec un atelier presque à " ciel ouvert " et elle évoque l'importance de l'espace dans son travail rythmé par le trait. La musicalité de l'espace imprègne l'ensemble de son oeuvre qu'il s'agisse des peintures et des gravures où le blanc et le noir règnent en souverains dans le silence d'un absolu sans nom et sans frontières.
Brigitte Camus |